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LA RÉVOLUTION


sur les hommes et les choses. — À cet effet, on emploie, en premier lieu, la garde nationale et la gendarmerie ordinaire ; bien entendu, depuis 1792, on a incessamment épuré ces deux troupes, jusqu’à n’y plus laisser que des énergumènes et des machines[1] ; néanmoins, à mesure que le système se développe, on continue à les purger. À Strasbourg[2], le 14 brumaire, les représentants ont destitué, arrêté et expédié à Dijon tout l’état-major de la garde nationale, pour y servir d’otage jusqu’à la paix ; trois jours après, considérant que la cavalerie de la ville s’est équipée et montée à ses frais, ils la jugent aristocratique, bourgeoise, suspecte, saisissent ses chevaux et mettent ses officiers en arrestation. — À Troyes, pour la même raison et non moins brusquement, Rousselin, « commissaire civil national », destitue d’un coup tous les gendarmes, moins quatre, et « met en réquisition leurs chevaux tout équipés avec leurs armes, pour être montés sur-le-champ par des sans-culottes connus et éprouvés ». — Car, en principe, les indigents, les sans-culottes de cœur et d’habit, ont seuls le droit de porter des armes, et, quand un bourgeois fait le service, on ne lui confie qu’une pique, que l’on prend soin de lui retirer sitôt qu’il a fini sa faction[3].

Mais, à côté de la force armée ordinaire, il en est une

  1. Beaulieu, III, 454. — Cf. la Révolution, tome VII, livre I, ch. i, § 9.
  2. Recueil de pièces authentiques sur la Révolution à Strasbourg, I, 21. — Archives nationales, D, I, § 6 (Arrêté de Rousselin, 31 frimaire an II).
  3. Un séjour en France de 1792 à 1795, 409.