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LES GOUVERNANTS


« lorsqu’on a coopéré à la conservation d’une commune, on a le droit de boire à la République. » À cette buvette préside le représentant Bourbotte ; avec lui trinque Rossignol, ex-ouvrier bijoutier, puis massacreur de Septembre, toute sa vie crapuleux et brigand, maintenant général en chef ; avec Rossignol, ses adjudants généraux, Grammont, ancien comédien, et Hasard, ci-devant prêtre ; avec eux, Vacheron, bon « républiquain », qui viole les femmes et les fusille quand elles refusent de se laisser violer[1] ; outre cela, plusieurs demoiselles « brillantes » et sans doute amenées de Paris, dont « la plus jolie partage ses nuits entre Rossignol et Bourbotte », pendant que les autres servent aux inférieurs : mâle et femelle, toute la bande s’est installée dans un hôtel de Fontenay, où elle a commencé par briser les scellés, pour confisquer à son profit « les meubles, les bijoux, les robes, les ajustements de femme, et jusqu’aux porcelaines[2] ». Cependant, à Chan-

    la maison des représentants une quantité de bouteilles de vin rouge dont la consommation est plus forte que jamais. On a bien le droit de boire à la République, quand on a coopéré à la conservation de la commune que toi et les tiens habités. Je te fais responsable de ma demande. Signé, le républiquain Vacheron. »

  1. Camille Boursier, ib., 210. Déposition de Mme Édin, à propos de la fille Quénion, âgée de 26 ans, 12 brumaire an III, et à propos de la fille Rose. — Dépositions analogues de Bénaben et de Scotty.
  2. Dauban, la Démagogie en 1793, 369 (Extraits des mémoires inédits de Mercier du Rocher). — Ib., 370 : « Bourdon de l’Oise était demeuré avec Tuncq à Chantonnay, où ils s’occupaient à vider des bouteilles d’excellent vin. Bourdon est un excellent patriote, il a une âme sensible, mais il s’abandonne dans son ivresse à des vues impraticables. » — « Qu’on arrête, disait-il, ces scélérats d’administrateurs ! » — Puis, mettant la tête à la fenêtre, il entendit galoper un cheval qui avait rompu son licou :