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LA RÉVOLUTION


s’exaltent comme la veille, au signal que leur donnent les claqueurs et les habitués. — Un autre jour, c’est le procureur-syndic Lhuillier qui les convoque à l’Évêché, « pour fraterniser avec les autorités du département de Paris[1] » ; c’est la section de la Fraternité qui les appelle à ses assemblées quotidiennes ; c’est la Société des Jacobins qui, le matin, leur prête sa vaste salle et les admet à ses séances du soir. — Ainsi accaparés et maintenus comme sous une cloche à plongeur, ils ne respirent dans Paris que l’air jacobin ; de jacobinière en jacobinière, à mesure qu’on les promène dans cet air brûlant, leur pouls bat plus vite. Beaucoup d’entre eux étaient à l’arrivée « des gens simples et tranquilles[2] » ; mais, dépaysés et soumis sans préservatif à la contagion, ils contractent promptement la fièvre révolutionnaire. De même, dans un revival américain, sous un régime continu de prêches, de cris, de chants, de secousses nerveuses, les tièdes et les indifférents ne tardent pas à s’affoler eux-mêmes, et délirent à l’unisson des agités.

  1. Moniteur, XVII, 314 (Lettre de Lhuillier, 4 août) ; 322 (séance de la Commune, 4 août) ; 332 (séance de la Convention, 6 août). — Buchez et Roux, XXVIII, 409 (séance des Jacobins, 5 août).
  2. Buchez et Roux, XXVI, 411 (article du Journal de la Montagne).