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LA RÉVOLUTION


et de propagande, non seulement quand le moteur est un sentiment égoïste, comme l’intérêt personnel et la vanité vulgaire, mais aussi quand le moteur est un sentiment désintéressé, comme le besoin de découvrir la vérité ou de créer la beauté, la foi contagieuse ou la conviction communicative, l’enthousiasme religieux ou la générosité naturelle, l’amour large ou l’amour restreint, depuis celui qui embrasse l’humanité entière, jusqu’à celui qui se concentre sur les amis et sur les proches. Dans les deux cas l’effet est le même, parce que la cause est la même. Toujours, dans l’atelier que dirige l’individu libre, la force motrice est énorme, presque infinie, parce qu’elle est une source vive, dont l’eau toujours coulante travaille à toute heure et ne s’épuisera jamais. Incessamment la mère pense à son enfant, le savant à sa science, l’artiste à son art, l’inventeur à ses inventions, le philanthrope à ses fondations, Faraday à l’électricité, Stephenson à sa locomotive, M. Pasteur à ses microbes, M. de Lesseps à son isthme, les Petites Sœurs des Pauvres à leurs pauvres. Par cette attention extraordinaire, l’homme tire de ses facultés et de ses alentours tout le service possible ; il devient lui-même un outil perfectionné, et il s’en façonne d’autres : chaque jour dans la puissante machine qu’il conduit et dont il est le premier rouage, il diminue les frottements, il augmente le rendement, il économise, entretient, répare, améliore, avec une compétence et un succès que nul ne conteste ; bref, il fabrique d’une façon supérieure. — Mais cette source