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LA RÉVOLUTION


duré de cinq heures du matin à sept heures du soir, et la municipalité était prévenue ; mais elle ne pouvait se déranger pour les secourir ; ses occupations étaient trop graves : elle plantait un arbre de la Liberté.

Route de Bordeaux à Caen. — Le doigt du ministre remonte vers le nord, et rencontre Limoges. Là, le lendemain de la Fédération a été célébré comme à Bordeaux[1]. Un prêtre insermenté, l’abbé Chabrol, assailli par une bande d’hommes et de femmes, a d’abord été mené au corps de garde, puis dans la maison du juge de paix ; on a décerné contre lui, pour son salut, un mandat d’arrêt et on l’a fait garder à vue par quatre chasseurs dans une chambre. Mais rien de tout cela n’a suffi à la populace. Vainement les officiers municipaux l’ont suppliée ; vainement les gendarmes se sont mis entre elle et le prisonnier : elle les a bousculés et dispersés. Cependant les vitres de la maison volaient en éclats sous les pierres et la porte s’ébranlait sous les coups de hache ; une trentaine de forcenés ont escaladé les fenêtres et descendu le prêtre comme un paquet. À cent pas de là, « excédé de coups de bâtons et d’autres instruments, » il a rendu le dernier soupir, la tête « écrasée » de vingt coups mortels. — Plus haut, vers Orléans, Roland lit dans le dossier du Loiret les dépêches suivantes[2] : « L’anarchie est à son comble, écrit

  1. Archives nationales, F7, 3275. Lettre des administrateurs de la Haute-Vienne, 28 juillet (avec procès-verbaux).
  2. Archives nationales. F7, 3223. Lettre du directoire du district de Neuville aux administrateurs du département, 18 septembre.