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LA RÉVOLUTION


ce qui pouvait forcer et fausser le vote. Au préalable, on a imposé à l’Assemblée électorale la présence du peuple, et à cet effet on l’a transférée dans la grande salle des Jacobins sous la pression des galeries jacobines. Par une seconde précaution, on a exclu du vote tout opposant, tout constitutionnel, tout ancien membre du club monarchique, du club de la Sainte-Chapelle et du club des Feuillants, tout signataire de la pétition des 20 000 ou de la pétition des 8000, et, quand des sections ont protesté, on a rejeté leur réclamation comme le fruit d’une « intrigue ». Enfin, à chaque tour de scrutin, on a fait l’appel nominal, et chaque électeur a dû voter à haute voix ; on était sûr d’avance que son vote serait bon : les avertissements qu’il avait reçus étaient trop nets. Le 2 septembre, pendant que l’assemblée électorale tenait à l’évêché sa première séance, les Marseillais, à cinq cents pas de là, venaient prendre les vingt-quatre prêtres de la mairie et dans le trajet, sur le Pont-Neuf, les lardaient déjà à coups de sabre. Toute la soirée et

    tembre), puis Danton et Collot d’Herbois (6 septembre), puis Manuel et Billaud-Varennes (7 septembre), ensuite Camille Desmoulins (8 septembre), Marat (9 septembre), etc. — Mortimer-Ternaux, IV, 35 (arrêté de la Commune, sur L’instigation de Robespierre, pour le règlement des opérations électorales). — Louvet, Mémoires. À l’assemblée électorale, Louvet demande la parole pour discuter la candidature de Marat, et ne peut l’obtenir. « Comme je sortais, je fus entouré de ces hommes à gros bâtons et à sabres dont le futur dictateur marchait toujours environné, des gardes du corps de Robespierre. Ils me menacèrent, ils me dirent en propres termes : « Avant peu, tu y passeras. » Ainsi l’on était libre dans cette assemblée où, sous les poignards on votait à haute voix ! »