introduit dans sa machine animale et morale deux émotions extraordinaires et disproportionnées qui la bouleversent, d’une part la sensation de la toute-puissance exercée sans contrôle, obstacle ou danger, sur la vie humaine et sur la chair sensible[1], d’autre part la sensation de la mort sanglante et diversifiée, avec son accompagnement toujours nouveau de contorsions et de cris[2] ; jadis dans les cirques romains, on ne pouvait s’en détacher : celui qui avait vu le spectacle une fois y revenait tous les jours. Et justement, aujourd’hui, chaque cour de prison est un cirque, avec cette aggravation que les spectateurs y sont acteurs. — Ainsi, pour eux, les deux brûlantes liqueurs se mêlent en un seul breuvage. À l’ivresse morale ajoutez l’ivresse physique, le vin à profusion, les rasades à chaque pause, l’orgie sur les cadavres ; et tout de suite, de la créature dénaturée, vous verrez sortir le démon de Dante, à la fois bestial et raffiné, non seulement destructeur, mais encore bourreau, inventeur et calculateur de souffrances, tout glorieux, et joyeux du mal qu’il fait.
Ils sont gais ; autour de chaque nouveau cadavre, ils dansent, ils chantent la carmagnole[3] ; ils font lever les
- ↑ Voyez les enfants qui noient un chien ou tuent une couleuvre : la ténacité de la vie les offense comme une révolte contre leur despotisme, et ils s’acharnent sur la bête à coups redoublés.
- ↑ Se rappeler l’effet des courses de taureaux, et l’attrait irrésistible des spectacles du cirque sur saint Augustin, lorsqu’il eut entendu pour la première fois le cri d’un gladiateur frappé à mort.
- ↑ Mortimer-Ternaux, III, 131. Procès des septembriseurs, résumé du président. « Le 3e témoin et le 46e vous ont dit avoir vu Monneuse (membre de la Commune) aller et venir à la Force, se réjouir des tristes événements qui venaient d’y avoir lieu, y