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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


tère de la justice, devant les commandants de bataillon et les chefs de service, devant Lacroix, président de l’Assemblée nationale, et Pétion, maire de Paris, devant Clairière, Servan, Monge, Lebrun et tout le conseil exécutif, sauf Roland, réduit d’un geste les principaux personnages de l’État à l’office de complices passifs et répond à un homme de cœur qui se lève pour arrêter les meurtres : « Sieds-toi, c’était nécessaire[1]. » C’est lui qui, le même jour, fait expédier sous son contre-seing la circulaire par laquelle le comité de surveillance annonce le massacre et invite « ses frères des départements » à suivre l’exemple de Paris[2]. C’est lui qui, le

    donc pas dit ; reprit Camille, qu’on ne confondra pas les innocents avec les coupables ? Tous ceux qui seront réclamés par leur section seront rendus. » — Le 4, Desmoulins vient au bureau du journal et dit aux rédacteurs : « Eh bien, tout s’est passé dans le plus grand ordre. Le peuple a même mis en liberté beaucoup d’aristocrates contre lesquels il n’y avait pas de faits directs… J’espère que vous allez rendre un compte exact de tout ceci, car le Journal des Révolutions est la boussole de l’opinion publique. »

  1. Prudhomme, Ib., 123. D’après le récit de Théophile Mandar, vice-président de section, témoin et acteur dans la scène, et qui autorise Prudhomme à le nommer. — Ensuite, dans la seconde pièce, Mandar propose à Pétion et à Robespierre de venir le lendemain à l’Assemblée pour réclamer contre le massacre ; au besoin l’Assemblée nommera un dictateur pour 24 heures. « Garde-t’en bien, répondit Robespierre, Brissot serait dictateur. » — Pétion ne dit mot. « Tous les ministres étaient parfaitement d’accord pour laisser continuer les égorgements. »
  2. Mme Roland, II, 37. — Angers et le département de Maine-et-Loire de 1787 à 1830, par Bordier-Langlois. À la circulaire était jointe une adresse imprimée, intitulée Compte rendu au peuple souverain, « revêtu du contreseing du ministre de la justice, avec le sceau du ministre sur le paquet, » et adressée aux sociétés jacobines des départements pour prêcher aussi le massacre.


  la révolution. iv.
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