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LA RÉVOLUTION


limites exactes de la loi qu’ils outrepassent. Bien mieux, elle dissout le conseil intrus et lui substitue quatre-vingt-seize délégués, que les sections devront nommer dans les vingt-quatre heures. Bien mieux encore, elle lui commande de rendre compte, dans les deux jours, de tous les effets qu’il a saisis et de porter les matières d’or et d’argent à la Trésorerie. Cassés et sommés de dégorger leur proie, les autocrates de l’Hôtel de Ville ont beau, le lendemain, venir en force à l’Assemblée[1] pour lui extorquer le rappel de ses décrets : sous leurs menaces et les menaces de leurs satellites, l’Assemblée tient bon. — Tant pis pour les opiniâtres : puisqu’ils ne veulent pas voir l’éclat du sabre, ils en sentiront le tranchant et la pointe. Sur la proposition de Manuel, la Commune décide que, tant que durera le danger public, elle restera en place ; elle adopte une adresse de Robespierre pour « remettre au peuple le pouvoir souverain », c’est-à-dire pour faire descendre les bandes armées dans la rue[2] ; elle se rallie les brigands en leur conférant la propriété de tout ce qu’ils ont volé dans la journée du 10 août[3]. — La séance, prolongée pendant la nuit, ne

  1. Mortimer-Ternaux, III, 171, séance du 31 août. Ib., 208. — Le lendemain, 1er  septembre, à l’instigation de Danton, Thuriot obtient de l’Assemblée nationale un décret ambigu qui semble permettre aux membres de la Commune de siéger encore, au moins provisoirement, à l’Hôtel de Ville.
  2. Procès-verbaux de la Commune, 1er  septembre.
  3. Ib., 1er  septembre : « Il est arrêté que les effets qui sont tombés au pouvoir des citoyens combattant pour la liberté et l’égalité dans la journée du 10 août resteront en leur possession, et conséquemment M. Tallien, secrétaire-greffier, est autorisé à remettre une montre d’or à M. Lecomte, gendarme. »