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LA RÉVOLUTION


fauteuil, ils demandent « qu’il soit cassé ». Basire veut « lui arracher des mains » une déclaration qu’il présente ; Bourdon, de l’Oise, lui crie que, « s’il est assez osé pour la lire[1], il l’assassine ». La salle « est devenue une arène de gladiateurs[2] ». Parfois, la Montagne se précipite tout entière hors de ses bancs, et, contre cette vague humaine qui descend de gauche, une vague pareille descend de droite : les deux s’entrechoquent au centre de la salle, parmi des cris et des gestes furieux, et, dans une de ces bagarres, un montagnard ayant présenté son pistolet, le girondin Lauze-Deperret tire l’épée[3]. À partir du milieu de décembre, des membres marquants du côté droit, « continuellement poursuivis, menacés, outragés », réduits « à découcher toutes les nuits, sont forcés d’avoir des armes pour leur défense[4] », et, après le supplice du roi, ils en apportent « presque tous » aux séances de la Convention. En effet, chaque jour, ils peuvent s’attendre à l’assaut final, et ils ne veulent pas mourir sans vengeance : dans la nuit du 9 au 10 mars, ne se trouvant plus que quarante-trois, ils se font passer le

  1. Moniteur, XV, 74. — Buchez et Roux, XXVII, 254, 257, séances du 6 janvier et du 27 mai.
  2. Ib., XIV, 851, séance du 26 décembre, 1792. Discours de Jullien de la Drôme.
  3. Ib., XIV, 768, séance du 16 décembre. Le président : « J’ai rappelé trois fois Calon à l’ordre ; trois fois il a résisté. » — Vergniaud : « La majorité de l’Assemblée (est) sous le joug d’une minorité séditieuse. » — Ib., XIV, 851, 853, 865, séances du 26 et du 27 décembre. — Buchez et, Roux, XXV, 396, séance du 11 avril.
  4. Louvet, 72.