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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


pendant quatre mois ; puis, en décembre[1], quand il est enfin obligé de se dissoudre, il reparaît, autorisé de nouveau par le suffrage populaire, renforcé et complété par ses pareils, avec trois chefs, procureur-syndic, substitut et maire, tous les trois auteurs ou fauteurs de septembre, avec Chaumette, soi-disant Anaxagoras, ancien mousse, puis clerc, puis, commis, toujours endetté, bavard et buveur ; avec Hébert, dit le Père Duchesne, et c’est tout dire ; avec Pache, subalterne empressé, intrigant doucereux, qui a exploité son air simple et sa figure de brave homme pour se pousser jusqu’au ministère de la guerre, qui a mis là tous les services au pillage, et qui, né dans une loge de concierge, y revient dîner par calcul ou par goût. — Par delà l’autorité civile, les Jacobins ont accaparé aussi le pouvoir militaire. Aussitôt après le 10 août[2], la garde nationale refondue a été distribuée en autant de bataillons qu’il y a de sections, et chaque bataillon est ainsi devenu « la section armée » ; là-dessus, on devine de quoi maintenant il se compose, et quels démagogues il se choisit

  1. Mortimer-Ternaux, VI, 117 ; VII, 59 (scrutins des 2 et 4 décembre). — Dans la plupart de ces scrutins et de ceux qui suivent, le nombre des votants n’est que le vingtième de celui des inscrits. Chaumette est élu dans sa section par 53 voix, Hébert par 56, Gentry, maître tonnelier, par 34, Lechenard, tailleur, par 39, Douce, ouvrier en bâtiment, par 24. — Pache, élu maire le 15 février 1793, obtient 11881 voix sur 160000 inscrits.
  2. Buchez et Roux, XVII, 101. (Décret du 19 août 1792.) — Mortimer-Ternaux, IV, 223. — Beaulieu, Essais, III, 454. « Depuis le 10 août, la garde nationale a cessé d’exister. » — Buzot, 454. — Schmidt, I, 533. (Dutard, 29 mai) : « Il est de fait que la force armée de Paris est nulle. »