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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


se prolongent pendant six semaines et davantage ; il s’en fait au delà du département, à Manosque dans les Basses-Alpes, et Manosque, obligée de verser pour indemnité de déplacement 104 000 livres « à ses sauveurs et à ses pères », écrit au ministre que désormais elle ne peut plus acquitter ses impositions.

De quelle espèce sont les souverains improvisés qui ont institué ce brigandage ambulant ? — Là-dessus Roland n’a qu’à interroger son ami Barbaroux, leur président et l’exécuteur de leurs arrêts : « neuf cents personnes, écrit Barbaroux lui-même, en général peu instruites, n’écoutant qu’avec peine les gens modérés et s’abandonnant aux effervescents, des intrigants habiles à semer la calomnie, de petits esprits soupçonneux, quelques hommes vertueux, mais sans lumières, quelques gens éclairés, mais sans courage, beaucoup de patriotes, mais sans mesure, sans philosophie », bref un club jacobin, si jacobin, « qu’à la nouvelle des massacres du 2 septembre, il fit retentir la salle de ses applaudissements[1] » ; au premier rang, une foule d’hommes avides d’argent et de places, dénonciateurs éternels, supposant des troubles ou les exagérant pour se faire donner des commissions lucratives[2] », en d’autres termes la meute ordinaire des

    détruit, et nous gémissons sous le joug bien plus pesant d’une foule de despotes. » — Situation du département en septembre et octobre 1792 (avec pièces à l’appui).

  1. Barbaroux, Mémoires, 89. »
  2. Archives nationales, F7, 3196. — Lettres et pétition du citoyen de Sade, novembre 1792, 17 février 1793, et 8 ventôse an III : « Vers le milieu de septembre 1792 (vieux style), des