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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


d’Aix, d’Aubagne, d’Apt, de Brignoles, d’Eyguières, et il y en a plusieurs séries à Marseille, une en juillet, deux en août, deux en septembre[1] ; mais il doit y être accoutumé. Ce qui le trouble, c’est que là-bas le lien national se rompt ; il voit des départements qui se détachent : des États nouveaux, distincts, indépendants, complets se fondent en invoquant la souveraineté du peuple ; publiquement et officiellement, ils gardent pour leurs besoins locaux les impôts perçus pour le gouvernement du centre, ils décernent des peines contre leurs habitants réfugiés en France, ils instituent des tribunaux, ils imposent des contributions, ils lèvent des troupes et font des expéditions militaires[2]. Réunis pour nommer leurs

  1. Fabre, Histoire de Marseille, II, 478 et suivantes. — Archives nationales, F7, 3195. Lettre du ministre de la justice, M. Dejoly (avec pièces à l’appui), 6 août. — Procès-verbaux de la municipalité de Marseille, 21, 22 et 23 juillet. — Procès-verbal de la municipalité d’Aix, 24 août. — Lettre du procureur-syndic du département (avec une lettre de la municipalité d’Aubagne), 22 septembre, etc. M. Jourdan, officier ministériel à Aubagne, était accusé « d’aristocratie » ; on lui avait donné une garde ; vers minuit et demi, la garde est enfoncée, il est enlevé, puis tué, malgré les supplications de sa femme et de son fils. La lettre de la municipalité finit ainsi : « Leurs lamentations nous percent le cœur. Mais, hélas ! qui peut résister au peuple français dans sa fureur ? Nous sommes très cordialement, messieurs, les officiers municipaux d’Aubagne. »
  2. Moniteur, XIII, 560. Arrêté des administrateurs des Bouches-du-Rhône, 3 août, « pour défendre aux receveurs particuliers de verser dorénavant les impôts à la trésorerie nationale ». — Ib., 744. Rapport de Roland. Le département du Var a convoqué à Avignon une réunion de commissaires, à l’effet de pourvoir à la défense de ces contrées : « Cette mesure, dit le ministre, subversive de tout gouvernement, rend nulles les dispositions générales du pouvoir exécutif. » — Archives nationales, F7, 3195. Délibération des trois corps administratifs réunis à Marseille