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LA SECONDE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


avec sa famille, laissant toutes les portes ouvertes. Pillage général pendant cinq heures ; ils boivent les vins précieux, volent l’argenterie, exigent des chevaux pour emporter leur butin, et promettent de revenir bientôt pour avoir la tête du propriétaire. — Effectivement, le lendemain matin, à quatre heures, nouvelle invasion, nouveau pillage, définitif cette fois ; à travers les coups de fusil, les domestiques se sauvent, et M. de Gouy, sur la requête du village dont on dévaste les vignes, est obligé de quitter le pays[1]. — Inutile d’achever le dossier. Chez M. de Saint-Maurice Houdainville, chez le duc de Bourbon à Nointel, chez le prince de Condé à Chantilly, chez M. de Fitz-James et ailleurs, un certain Gauthier, « commandant du détachement de Paris en perquisition et chargé des pouvoirs du comité de surveillance, » opère sa tournée patriotique, et Roland sait d’avance en quoi elle consiste : c’est une dragonnade en règle chez tous les nobles absents ou présents[2].

  1. La lettre finit ainsi : « Non, je n’abandonnerai jamais le sol français. » — Guillotiné à Paris, le 5 thermidor an II, comme complice de la prétendue conspiration des prisons.
  2. Archives nationales, F7, 3265. Lettre des administrateurs de l’Oise, 12 et 15 septembre. — Lettre du procureur-syndic du département, 23 septembre. — Lettre des administrateurs de l’Oise, 20 septembre (sur Chantilly) : « Les richesses immenses de cet endroit sont au pillage. » — Dans la forêt de Hez et dans le parc de M. de Fitz-James, devenus propriétés nationales, « les plus beaux arbres sont débités sur place, transportés, vendus publiquement. » — F7, 3268. Lettre du directeur des domaines nationaux de Rambouillet, 31 octobre. Dévastation des bois, « perte de plus de 100 000 écus depuis le 10 août ». — « Les agitateurs qui prêchent la liberté aux citoyens des campagnes sont ceux-là mêmes qui occasionnent les désordres dont tout le pays est menacé. Ce