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LA RÉVOLUTION


clusions sur le passé, le présent et l’avenir de l’humanité, axiomes de droit absolu, système de la vérité complète et définitive, le tout concentré en quelques formules rigides, par exemple : « La religion est une superstition ; la monarchie est une usurpation ; tous les prêtres sont des imposteurs ; tous les aristocrates sont des vampires ; tous les rois sont des tyrans et des monstres. » De telles pensées déversées dans un tel esprit sont un torrent énorme qui s’engouffre dans un conduit étroit : elles le bouleversent ; ce n’est plus lui qui les dirige, ce sont elles qui l’emportent. L’homme est hors de soi : de simple bourgeois ou d’ouvrier ordinaire, on ne devient pas impunément apôtre et libérateur du genre humain. — Car c’est bien le genre humain, ce n’est pas seulement sa patrie qu’il sauve. Quelques jours avant le 10 août, Roland disait « les larmes aux yeux » : « Si la liberté meurt en France, elle est à jamais perdue pour le reste du monde ; toutes les espérances des philosophes sont déçues ; la plus cruelle tyrannie

    gement du peuple français et principalement pour l’habitant des campagnes ?… Sans l’énergie de Paris, Paris et la France ne seraient maintenant habités que par des esclaves, et ce beau sol présenterait sans doute un aspect aussi sauvage et aussi désert que celui de l’empire de Turquie, celui d’Allemagne. » Cela nous a conduits « à donner encore plus de lustre à cette révolution en rétablissant sur la terre les anciennes républiques d’Athènes et autres de la Grèce dans toute leur pureté ; nulle distinction n’existait chez les premiers peuples de la terre ; les premiers liens de famille unissaient les peuples dont la souche et l’origine n’étaient pas anciennes ; ils n’avaient d’autres lois entre eux, dans leurs républiques que celles, pour ainsi dire, que leur inspiraient les sentiments de fraternité qu’ils éprouvaient au berceau des premiers peuples. »