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LA RÉVOLUTION


blées de section. — Au contraire, rien de plus attrayant pour, les désœuvrés, piliers de café, orateurs de cabaret, flâneurs et bavards, logés en « chambre garnie[1] », pour les réfractaires et les parasites de l’armée sociale, pour, tous ceux qui, sortis du cadre ou n’ayant pu y rentrer, veulent le mettre en pièces, et, faute d’une carrière privée, se font une carrière publique. Pour eux, pour les fédérés oisifs, pour les cerveaux dérangés, pour le petit troupeau des vrais fanatiques, les séances permanentes, même de nuit, ne sont pas trop longues. Ils y sont acteurs ou claqueurs, et le vacarme ne les choque point, puisqu’ils le font. Ils s’y relayent pour être toujours en nombre, ou suppléent au nombre par la brutalité et l’usurpation. Au mépris de la loi, la section du Théâtre-Français, conduite par Danton, lève la distinction des citoyens actifs et des citoyens passifs, et accorde à tous les individus domiciliés dans sa circonscription le droit de présence et de vote. D’autres sections[2] admettent à leurs séances tous les spectateurs de bonne volonté, femmes, enfants, nomades, agitateurs et agités, qui, comme à l’Assemblée nationale, applaudissent ou huent sur un mot d’ordre. Dans les sections qui ne veulent pas se mettre à la merci d’un public anonyme, la même tourbe d’énergumènes fait tapage à la porte et insulte les électeurs qui entrent. — Grâce à ce personnel ambu-

  1. Schmidt, Tableaux de la Révolution, I, 99-100. Rapport à Roland, 29 octobre 1792.
  2. Mortimer-Ternaux, II, 199. — Buchez et Roux, XVI, 250. — Moniteur, XIII, 336, séance du 5 août. Discours de Collot d’Herbois.