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LA RÉVOLUTION


subjuguer Arles, « pour réparer la honte de l’avoir fondée[1] ». Dans ce pays de vieilles cités, l’hostilité politique s’envenime de haines municipales, semblables à celles de Thèbes contre Platée, de Rome contre Veïes, de Florence contre Pise, et les guelfes de Marseille ne songent plus qu’à écraser les gibelins d’Arles. — Déjà, dans l’assemblée électorale de novembre 1791, M. d’Antonelle, président, a fait inviter toutes les communes du département à prendre les armes contre la cité anti-jacobine[2] ; 600 volontaires marseillais sont partis à l’instant, se sont installés à Salon, ont saisi le procureur-syndic du district ennemi, refusent de le rendre, et sont l’avant-garde de 4000 hommes promis par les quarante ou cinquante clubs du parti[3]. Pour les retenir, il a fallu l’ordre des trois commissaires, les arrêtés du directoire encore intact, les proclamations du roi, un décret de l’Assemblée constituante, la ferme attitude des troupes qui obéissent encore, l’attitude plus ferme des Arlésiens, qui ont réprimé une insurrection des

  1. Archives nationales, F7, 3196. Lettre des membres du directoire d’Arles et des officiers municipaux au ministre, 3 mars 1792 (avec une diatribe imprimée de la municipalité de Marseille).
  2. Ib., F7, 3198. Lettres du procureur-syndic du département au ministre, Aix, 14, 15, 20 et 23 septembre 1791. L’assemblée électorale s’est déclarée permanente, « les autorités constitutionnelles sont enchaînées et méconnues ». — Lettre des membres du bureau militaire d’urgence et de correspondance au ministre, Arles, 17 septembre 1791.
  3. Ib. Lettre du commandant du détachement marseillais au directoire du département, 22 septembre 1791. : « Je sens que notre démarche n’est pas tout à fait légale ; mais c’est par prudence que j’ai cru devoir acquiescer au vœu général du bataillon. »