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LA RÉVOLUTION


le 4 février 1792, la municipalité envoie Barbaroux, son secrétaire, à Paris, pour y pallier les attentats qu’elle prépare. Dans la nuit du 25 au 26, la générale bat, et trois ou quatre mille Marseillais, avec six pièces de canon, marchent sur Aix. Par précaution, ils feignent de n’avoir point de chefs, ni commandant, ni capitaines, ni lieutenants, ni même caporaux ; à les entendre, tous sont égaux, volontaires, requis par eux-mêmes : de cette façon, tous étant responsables, aucun ne l’est[1]. À onze heures du matin ils arrivent devant Aix, trouvent une porte ouverte par leurs affiliés de la populace et du faubourg, somment la municipalité de leur livrer tous les corps de garde en même temps leurs émissaires ont annoncé dans les communes voisines que la ville est menacée par le régiment suisse : en conséquence quatre cents hommes d’Aubagne arrivent en toute hâte ; d’heure en heure, on voit affluer les gardes nationales des villages environnants ; les rues s’emplissent de gens armés, des vociférations s’élèvent, le tumulte croît, et, dans la panique universelle, la municipalité perd la tête. Elle

  1. Archives nationales, F7, 3195. Procès-verbal de la municipalité d’Aix (sur les événements du 26 février), 1er mars. — Lettre de M. Villardy, président du directoire, datée d’Avignon, 10 mars (il a failli être assassiné à Aix). — Ib., F7, 3196. Rapport des administrateurs du district d’Arles, 28 février (d’après des lettres privées d’Aix et de Marseille). — Barbaroux, Mémoires (collection Berville et Barrière), 106. (Relation de M. de Watteville, major du régiment d’Ernest. — Ib., 108. Mémoire de M. de Barbentane, général commandant.) Ces deux pièces montrent le libéralisme, la mollesse, l’indécision ordinaires des autorités supérieures, surtout des autorités militaires. — Mercure de France, n° du 24 mars 1792 (lettres d’Aix).