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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


« de l’homme, la souveraineté nationale et les piques ne passeront pas » et, par l’organe de son président, l’Assemblée nationale remercie les pétitionnaires « des avis que leur zèle les engage à lui donner ». — Entre les meneurs de l’Assemblée et la populace à piques, la partie est liée contre les riches, contre les constitutionnels, contre le gouvernement, et désormais, à côté des Girondins marchent les Jacobins extrêmes, les uns et les autres réconciliés pour l’attaque, sauf à différer après la victoire. « Le projet des Girondins[1] n’est pas la république de nom, mais la république de fait, par une réduction de la liste civile à 5 millions, par le retranchement de la plupart des attributs laissés au roi, par le changement de la dynastie dont le nouveau chef serait une espèce de président honoraire de la république, auquel ils donneraient un conseil exécutif nommé par l’Assemblée, c’est-à-dire par eux-mêmes. » Quant aux Jacobins extrêmes, on ne leur découvre d’autre principe « que celui d’une application immodérée et à la rigueur des Droits de l’homme. À l’aide de cette charte, ils aspirent à changer les lois et les officiers publics chaque semestre, à étendre leur nivellement sur toute autorité régulière, sur les prééminences légales, sur les propriétés. Le seul régime qu’ils ambitionnent est la démocratie de la canaille délibérante… Les plus vils agents, les perturbateurs de profession, les brigands, les fanatiques, les scélé-

  1. Mallet du Pan, Mémoires, II, 429 (note de juillet 1792). — Mercure de France, n° du 10 mars 1792, article de Mallet du Pan.