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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


tement, la France réclamait contre les rassemblements d’émigrés que l’Empereur et les Électeurs toléraient contre elle sur leur territoire. Mais, d’abord, quelques milliers de gentilshommes, sans soldats, sans magasins et presque sans argent[1], n’étaient guère à craindre, et, de plus, bien avant l’heure décisive, leurs rassemblements avaient été dispersés, à l’instant par l’Empereur dans ses États propres, au bout de quinze jours par l’électeur de Trèves dans son Électorat[2]. — D’autre part,

  1. Moniteur, X, 178, séance du 20 octobre 1791. Informations données par les députés du Haut-Rhin et du Bas-Rhin. — M. Koch : « Jamais il n’a existé d’armée d’émigrés, sinon un chétif rassemblement fait à Ettenheim, à quelques lieues de Strasbourg… (Cette troupe) campait sous des tentes, mais c’est parce qu’elle manquait de bâtiments et de casernes. » — M…, député du Bas-Rhin : « Cette armée d’Ettenheim est composée d’environ 5 à 600 hommes mal vêtus, mal payés, déserteurs de toutes les nations, logés sous des tentes, faute de bâtiments, armés de bâtons, faute d’armes, et désertant tous les jours, parce que l’argent commençait à manquer. La seconde armée, à Worms, commandée par un Condé, est composée de 300 gentilshommes et d’autant de valets et palefreniers. J’ajouterai que les lettres qui me sont parvenues de Strasbourg et qui sont des extraits d’avis de Francfort, Munich, Ratisbonne et Vienne, annoncent les intentions les plus pacifiques de la part des différentes cours, depuis la notification de l’acceptation du roi. » — Le nombre des émigrants armés grossit, mais reste toujours fort petit. — Ib, X, 678. Lettre de M. Delatouche, témoin oculaire, 10 décembre : « Je présume que le nombre des émigrés répandus chez le prince de Bade, l’évêque de Spire, les électeurs, etc., monte à peine à 4000 hommes. »
  2. Ib, X, 418, séance du 16 novembre 1791. Rapport du ministre, M. de Lessart. L’empereur a donné des ordres, en août, pour interdire les enrôlements et éloigner les Français suspects, en octobre pour éloigner les Français trop nombreux à Ath et à Tournai. — Buchez et Roux, XII, 395, réclamation du roi, 14 décembre. — Ib., XIII. 15, 16, 19, 52. Satisfaction complète donnée par l’électeur de Trèves, 1er  janvier 1792, communiquée à l’As-