Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 4, 1910.djvu/88

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
76
LA RÉVOLUTION


deux autres, le 11 avril, sortent en triomphe du château d’If, escortés par huit cents gardes nationaux ; ils se rendent pour la forme aux prisons de la sénéchaussée ; dès le lendemain, ils sont mis en liberté, et, à leur endroit, toute instruction cesse. — En revanche, le colonel de Royal-Marine, M. d’Ambert, coupable d’un mot trop vif contre la garde nationale et acquitté par le tribunal devant lequel on l’a traduit, ne peut être élargi qu’en secret et sous la protection de deux mille soldats ; la populace veut brûler la maison du lieutenant criminel qui a osé l’absoudre ; ce magistrat lui-même est en danger et forcé de se réfugier dans la maison du commandant militaire[1]. — Cependant, imprimés, écrits à la main, libelles injurieux de la municipalité et du club, délibérations séditieuses ou violentées des districts, quantité de pamphlets sont distribués gratis au peuple et aux soldats : de parti pris, on insurge d’avance les troupes contre leurs chefs. — En vain ceux-ci se font doux, conciliants, réservés. En vain le commandant en chef est parti avec la moitié des troupes. Il s’agit maintenant de déloger le régiment qui est dans les trois forts. Le club en fait la motion, et ; de force ou de gré, il faut que la volonté populaire s’accomplisse. Le 29 avril, deux comédiens, aidés de cinquante volontaires, surprennent une sentinelle et s’emparent de Notre-Dame de la Garde. Le même jour, six mille gardes nationaux investissent les forts Saint-Jean et Saint-Nicolas.

  1. Archives nationales, F7, 3196. Lettres de M. de Miran, 11 et 16 avril, 1er  mai 1790.