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LA RÉVOLUTION


danser patriote, non contents « de décerner des proscriptions, de tuer, d’étriller et de massacrer souvent », ces nouveaux champions de l’Église gallicane entreprennent de réchauffer le zèle des contribuables. Une souscription ayant été proposée pour soutenir les familles des volontaires qui partent, le pouvoir exécutif se charge de reviser la liste des offrandes ; il taxe arbitrairement ceux qui n’ont pas donné ou qui, à son avis, ont donné trop peu, tels « pauvres ouvriers, à cinquante livres, tels à deux cents, trois cents, neuf cents, mille livres, sous peine de dévastation et de mauvais traitements ». Ailleurs, les volontaires de Baux et autres communes près de Tarascon se garnissent eux-mêmes les mains, et, « sous prétexte qu’ils doivent marcher pour la défense de la patrie, ils lèvent des contributions énormes sur les propriétaires », sur l’un quatre mille, sur l’autre cinq mille livres, emportant, à défaut de payement, tous les grains d’une ferme et jusqu’à la réserve de semence, menaçant de tout dévaster et incendier en cas de plainte, si bien que les propriétaires n’osent rien dire, et que le procureur-syndic du département voisin, craignant pour lui-même, demande que sa dénonciation soit tenue secrète. — Des bas-fonds des villes, la jacquerie s’est répandue dans les campagnes. Celle-ci est la sixième, et la plus vaste que l’on ait vue depuis trois ans[1].

  1. Moniteur, XII, 16, séance du 1er avril 1792. Discours de M. Laureau. « Voyez les provinces en feu, l’insurrection dans dix-neuf départements, et la révolte s’annonçant partout… La liberté n’est que celle du brigandage, nous n’avons ni impôts,