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LA RÉVOLUTION


canonisé du saint enseveli là depuis cent cinquante ans, si bien qu’après leur départ « l’édifice ressemble à une vaste grange remplie de démolitions et de décombres[1] ». Notez qu’en ce moment M. de Beaumont est commandant militaire du Périgord : par le traitement qu’il subit, jugez de celui qu’on réserve aux nobles ordinaires ; je ne leur conseille pas de se présenter aux adjudications[2]. — Seront-ils au moins libres dans leurs amusements domestiques, et, quand ils vont dans un salon, sont-ils sûrs d’y passer tranquillement leur soirée ? — À Paris même, dans un hôtel du faubourg Saint-Honoré, nombre de personnes de la bonne compagnie, parmi elles les ambassadeurs de Danemark et de Venise, écoutaient un concert donné par un virtuose étranger ; entre une charrette avec cinquante bottes de foin qui sont la provision du mois pour les chevaux. Un patriote, qui a vu entrer la charrette, imagine que le

  1. Archives nationales, F7, 3223. Lettre du comte Louis de Beaumont, 9 novembre 1791. Sa lettre, fort modérée, finit ainsi : « Convenez, monsieur, que tout cela est fort désagréable et même incroyable que les officiers municipaux soient les auteurs de tous les désordres qui se passent dans cette ville. »
  2. Mercure de France, 7 janvier 1792. M. Granchier, de Riom, adresse au directoire de son département une pétition à l’effet d’acheter le cimetière où son père a été enterré quatre années auparavant ; c’est pour empêcher la fouille décrétée du cimetière et pour conserver le tombeau de sa famille. Il demande en même temps à acheter l’église Saint-Paul, afin d’y acquitter les messes fondées pour l’âme de son père. — Le directoire répond (5 décembre 1791) : « Considérant que les moyens qui ont déterminé l’exposant à faire sa déclaration sont le simulacre d’une bonhomie dans laquelle le prestige impuissant pour séduire la saine raison est enveloppé, le directoire arrête qu’il n’y a lieu à accueillir la demande du sieur Granchier. »