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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


pour la résidence et la vie commune, deux religieux, avant de partir, donnent à M. de Beaumont, leur voisin et ami, quatre poiriers nains et des oignons à fleur de leur jardin. Là-dessus, la municipalité arrête que « le sieur Louis de Beaumont, ci-devant comte, est coupable d’avoir dégradé les biens nationaux témérairement et malicieusement », le condamne à 300 livres d’amende, ordonne « que les quatre poiriers arrachés dans la ci-devant Chartreuse seront portés demain, jour de mercredi, devant la porte dudit sieur de Beaumont, pour y rester pendant quatre jours consécutifs, et y être gardés à vue, nuit et jour, par deux fusiliers, aux frais et dépens dudit sieur de Beaumont, sur lesquels arbres sera placé un écriteau portant cette inscription : Louis de Beaumont dégradateur des biens nationaux. Et sera le présent arrêté imprimé au nombre de mille exemplaires, lu, publié, affiché aux frais et dépens dudit sieur de Beaumont, pour être adressé, dans tout le département du Lot, aux districts et municipalités dont il est composé, ainsi qu’à toutes les sociétés des Amis de la Constitution et de la Liberté ». À chaque ligne de cette invective légale, perce l’envie haineuse du plumitif local qui se venge d’avoir jadis salué trop bas. — L’année suivante, M. de Beaumont ayant racheté par-devant notaire une église vendue par le district avec tous les ornements et objets de culte qu’elle renferme, le maire et les officiers municipaux, suivis d’ouvriers, y viennent tout enlever et détruire, confessionnaux, autels et jusqu’au corps

  la révolution. ii.
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