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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE

III

Aussi bien, il n’y serait qu’un otage. Seul contre mille, seul représentant et survivant d’un régime aboli que tous détestent, c’est au seigneur qu’on s’en prend lorsqu’une secousse politique semble ébranler le régime nouveau. À tout le moins, comme il pourrait être dangereux, on le désarme, et, dans ces exécutions populaires, la brutalité ou la convoitise se lâchent comme un taureau qui crève une porte et se lance à travers une maison. — Dans ce même département[1], quelques mois plus tard, à la nouvelle de l’arrestation du roi à Varennes, « tous les prêtres insermentés et les ci-devant seigneurs sont en butte à toutes les horreurs de la persécution ». Des bandes entrent de force chez eux pour saisir leurs armes ; Commarin, Grosbois, Montculot, Chaudenay, Créancé, Toisy, Chatellenot et d’autres maisons sont ainsi visitées et plusieurs saccagées. Dans la nuit du 26 au 27 juin 1791, au château de Créancé,

  1. Archives nationales, DXXIX, 4. Lettre « le M. Le Belin-Chatellenot (près d’Arnay-le-Duc) au président de l’Assemblée nationale, 1er  juillet 1791. « Dans le royaume de la liberté, nous vivons sous la tyrannie la plus cruelle et l’anarchie la plus complète, et les corps administratifs et de police, encore dans leur enfance, ont l’air de n’agir qu’en tremblant… Jusqu’à présent, dans tous les crimes, ils sont plus occupés d’atténuer les faits que de punir les délits. En conséquence, les coupables n’ont été retenus que par quelques adresses doucereuses, comme : Chers frères et amis, vous êtes dans l’erreur, prenez garde, etc. » — Ib., F7, 3229. Lettre du directoire du département de la Marne, 15 juillet 1791. (Perquisitions par les gardes nationales dans les châteaux


  la révolution. ii.
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