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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


élections très sages et très calmes qui viennent d’avoir lieu, on n’a crié que Vive la Nation, la Loi et le Roi. « On a parlé de l’attachement des citoyens à la Constitution… » « L’obéissance aux lois, l’empressement le plus vif à acquitter les contributions publiques, voilà ce que nous avons remarqué chez ces prétendus contre-révolutionnaires. Tous ceux qui sont sujets à l’impôt des patentes se rendent en foule à l’hôtel de ville. » À peine « le bureau des recettes a-t-il été ouvert, que les honnêtes gens y ont afflué ; au contraire les soi-disant bons patriotes, républicains ou anarchistes, n’ont pas brillé dans cette occasion : un très petit nombre d’entre eux ont fait soumission. Les autres sont tout étonnés qu’on leur demande de l’argent : on les avait flattés d’un espoir si différent ! »

Bref, pendant plus de trente mois, sous une pluie continue de menaces, de spoliations et d’outrages, les nobles qui sont demeurés en France ne commettent et n’entreprennent aucune hostilité contre le gouvernement qui les persécute. Aucun d’eux, pas même M. de Bouillé, ne tente d’exécuter un véritable plan de guerre civile ; à cette date et dans leurs rangs, je ne trouve qu’un homme résolu, prêt à l’action et qui, contre un parti militant, travaille à former un parti militant ; il est vraiment politique et conspirateur, il s’entend avec le comte d’Artois, il fait signer des pétitions pour la liberté du Roi et de l’Église, il organise des compagnies armées, il embauche des paysans, il prépare une Vendée du Languedoc et de la Provence ; et c’est un bour-