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LA RÉVOLUTION


dres. Redon est menacé ; Ploërmel est presque assiégé. Au bout d’un mois, on compte trente-neuf châteaux attaqués, vingt-cinq où les titres ont été brûlés, douze où les propriétaires ont dû signer l’abandon de leurs droits. Deux châteaux qui commençaient à flamber ont été sauvés par la garde nationale. Celui du Bois-au-Voyer a été incendié tout à fait ; plusieurs ont été saccagés. Par surcroît, « plus de quinze procureurs fiscaux, greffiers, notaires, officiers de justice seigneuriale, ont été pillés ou brûlés », et les propriétaires se réfugient dans les villes parce que la campagne est maintenant inhabitable pour eux.

En même temps, sur un autre point, une seconde tumeur s’est ouverte[1]. Elle a percé dans le bas Limousin dès le commencement de janvier : de là l’inflammation purulente a gagné le Quercy, le haut Languedoc, le Périgord, le Rouergue, et, au mois de février, depuis Tulle jusqu’à Montauban, depuis Agen jusqu’à Périgueux et Cahors, elle couvre trois départements. — Là aussi, selon la règle, l’attente a créé son objet. À force de souhaiter une loi qui supprime toutes les redevances, on se figure qu’elle est faite ; et l’on répète que « le roi et l’Assemblée nationale ont ordonné des députations pour planter le Mai et pour éclairer les châteaux »

  1. Mercure de France, 6 et 27 février 1790 (discours de M. de Foucault, séances des 2 et 6 février). — Moniteur (mêmes dates) (rapport de Grégoire, 9 février, discours de M. Sallé-de-Choux et de M. de Noailles, 9 février). — Mémoire des députés de la ville de Tulle, rédigé par l’abbé Morellet (d’après les délibérations et adresses des quatre-vingt-trois bourgs et villes de la province).