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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


« les halles et que les prix du blé soient égaux dans toute la République. Car, n’en doutez pas, le patriotisme le plus pure (sic) s’éteint lorsqu’on n’a pas de pain… Résistance à l’oppression, oui, résistance à l’oppression, c’est le plus saint des devoirs ; est-il une oppression plus terrible que celle de manquer de pain ? Non, sans doute… Joignez-vous à nous, et ça ira, ça ira : nous ne pouvons mieux finir cette pétition que par cet air patriotique. » La supplique « été écrite sur un tambour, au milieu d’un cercle de fusils ; avec de tels accompagnements, elle vaut un ordre. — Ils le savent bien, et parfois, de leur autorité privée, ils se confèrent, non seulement le droit, mais encore le titre. Dans Loir-et-Cher[1], une bande de quatre à cinq mille hommes prend le nom de « Pouvoir souverain ». Ils vont de marché en marché, à Saint-Calais, à Montdoubleau, à Blois, à Vendôme, pour taxer les vivres, et leur troupe fait boule de neige ; car ils menacent « de brûler les meubles et d’incendier les propriétés de ceux qui n’auront pas le même courage qu’eux ». — En cet état de décomposition sociale, l’émeute est une gangrène où les parties saines sont infectées par les parties malades ; les attroupements se produisent et se reproduisent partout et sans cesse, gros et petits, pareils à des abcès pullulants, et renaissants, qui finissent par se rejoindre et se froisser douloureuse-

  1. Archives nationales, F7, 3230. Lettre d’un administrateur du district de Vendôme, avec délibération de la commune de Vendôme, 24 novembre 1792.


  la révolution. ii.
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