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LA RÉVOLUTION


ouvriers, et l’on entend des paroles, l’on voit des actes qui annoncent une jacquerie. « Les plus échauffés disaient à l’évêque : Nous sommes pauvres, vous êtes riche, et nous voulons tout votre bien. » — Ailleurs[1], les séditieux mettent à contribution tous les gens aisés ». À Brignoles, treize maisons sont pillées de fond en comble, trente autres à moitié. — À Aups, M. de Montferrat qui se défend est tué et « coupé en petits morceaux ». — À la Seyne, la populace, conduite par un paysan, s’assemble au son du tambour ; des femmes apportent une bière devant la maison d’un des principaux bourgeois, en lui disant de se préparer à la mort, et « qu’on lui fera l’honneur de l’enterrer ». Il se sauve, sa maison est pillée, ainsi que celle du piquet, et, le lendemain, le chef de la bande « oblige les principaux habitants à lui donner de l’argent pour indemniser, à ce qu’il dit, les paysans qui ont quitté leur travail », et employé leur journée au bien public. — À Peynier, le président de Peynier, octogénaire, est « assiégé dans son château par une bande de cent cinquante ouvriers et paysans », qui ont amené avec eux un consul et un notaire ; assistés de ces deux fonctionnaires, ils forcent le président « à passer un acte par lequel il renonce à ses droits seigneuriaux de toute espèce ». — À Solliès, ils détruisent les moulins de M. de Forbin-Janson, saccagent la maison de son homme d’affaires, pillent le château, démolissent le toit, la

  1. Archives nationales, H, 1274. Lettre de M. de la Tour, 2 avril (avec mémoire détaillé et dépositions).