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LA RÉVOLUTION


321 millions, les charges de la maison du roi, de la reine et des princes, 52 millions, les charges et emplois militaires, 35 millions, les dîmes inféodées, 100 millions, et le reste[1]. « Au mois de mai 1789, dit Necker, le rétablissement de l’ordre dans les finances n’était qu’un jeu d’enfant. » Au bout d’un an, à force de s’obérer, d’exagérer ses dépenses, d’abolir ou d’abandonner ses recettes, l’État ne vit plus que du papier qu’il émet, mange son capital nouveau, et marche à grands pas vers la banqueroute. Jamais succession si large n’a été si vite réduite à rien et à moins que rien.

En attendant, dès les premiers mois, on peut constater l’usage que les administrateurs sauront en faire et la façon dont ils vont doter le service auquel elle les astreint. — De tout le bien confisqué, aucune portion n’est réservée à l’entretien du culte, aux hôpitaux, aux asiles, aux écoles. Non seulement tous les contrats et tous les immeubles productifs tombent dans le grand creuset national pour s’y convertir en assignats, mais nombre de bâtiments spéciaux, tout le mobilier monastique, une portion du mobilier ecclésiastique, détournés de leur emploi naturel, viennent s’engloutir dans le même gouffre : à Besançon[2], trois églises sur huit, avec leurs biens-fonds et leur trésor, le trésor du chapitre,

  1. Moniteur, V, 571, séance du 4 septembre 1790, rapport du Comité des finances. — V, 675, séance du 17 septembre 1790, rapport de Necker.
  2. Sauzay, I, 228 (du 10 octobre 1790 au 24 février 1791). « Le poids total de la dépouille des couvents, tant en or qu’en argent et en vermeil, envoyé à la Monnaie, s’éleva à plus de cinq cent vingt-cinq kilogrammes » (pour le département).