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L’ÉGLISE


pays de marécages et de fièvres, où 50 meurent très vite de l’épidémie et de la contagion. — Toujours le même procédé terminal ; à l’abbé d’Astros, soupçonné d’avoir reçu et gardé une lettre du pape, Napoléon, menaçant, donnait cette consigne ecclésiastique : — « J’entends que l’on professe les libertés de l’Église gallicane : du reste, j’ai le glaive à mon côté, et prenez garde à vous ! » — En effet, au bout de toutes ses institutions, on découvre la sanction militaire, la punition arbitraire, la contrainte physique, l’épée qui va frapper ; involontairement, les yeux prévoient l’éclair brusque de la lame, et la chair pressent la rigidité pénétrante de l’acier.

VIII

On agit ainsi en pays conquis. Effectivement, il est dans l’Église en pays conquis[1] : comme la Hollande ou la Westphalie, elle est une communauté naturellement indépendante qu’il s’est annexée par traité, qu’il a pu englober, mais non absorber dans son empire, et qui reste invinciblement distincte. Dans une société spirituelle, le souverain temporel, surtout un souverain comme lui, catholique de nom, très peu chrétien, tout au plus déiste, et de loin en loin, à ses heures, ne sera jamais qu’un suzerain extérieur et un prince étranger.

  1. Rœderer, III, 430 (19 germinal an X) : « Le légat a été reçu aujourd’hui au palais consulaire ; en prononçant son discours, il tremblait comme, la feuille sur l’arbre. »