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L’ÉGLISE


point de constructions collatérales et supplémentaires, qui, par leur indépendance, dérangeraient l’uniformité de l’architecture totale ; point de congrégations monastiques ; plus de clergé régulier ; le clergé séculier suffit. « On n’a jamais[1] contesté à la puissance publique le droit d’écarter ou de dissoudre des institutions arbitraires qui ne tiennent point à l’essence de la religion, et qui sont jugées suspectes ou incommodes à l’État. » En principe, toutes les communautés religieuses doivent être jugées telles ; car elles sont des corps spontanés, elles s’organisent d’elles-mêmes et sans le concours de l’État, par la libre volonté de leurs membres ; elles vivent à part, selon le statut propre et particulier qu’elles se donnent, hors de la société laïque, à côté de l’Église établie, sous des chefs distincts qu’elles se choisissent, parfois sous des chefs étrangers, toutes plus ou moins indépendantes, toutes, par intérêt et par instinct, ralliées autour du saint-siège, qui, contre l’autorité diocésaine et la juridiction épiscopale, leur sert d’abri. Jadis « les moines[2] formaient la milice

  1. Discours, rapports, etc., par Portalis, 40. — Émile Ollivier, Nouveau Manuel de droit ecclésiastique, 193 (Réponse de Portalis aux réclamations du saint-siège, 22 septembre 1803). Avant 1789, écrit Portalis, « les religieux n’offraient plus qu’un spectacle peu édifiant… Le législateur ayant décidé qu’on ne pourrait plus s’engager par des vœux religieux jusqu’à vingt et un ans,… cette mesure écarta les novices ; les ordres religieux, minés par les mœurs et par le temps, ne pouvaient plus se recruter ; ils languissaient dans un état d’inertie et de défaveur qui était pire que l’anéantissement… Le siècle des institutions monastiques était passé. »
  2. Pelet de la Lozère, 166 (Paroles de Napoléon, 11 mars 1806).