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L’ÉGLISE


l’État grandit au delà de toute mesure et reste sans contrepoids. Au lieu d’une église, il en tient quatre, et la principale, la catholique qui comprend 33 millions de fidèles, plus dépendante que sous l’ancienne monarchie, perd les privilèges qui autrefois limitaient ou compensaient sa sujétion. — Jadis le prince était son chef temporel, mais à des conditions onéreuses pour lui, à condition d’être son évêque extérieur et son bras séculier, de lui livrer le monopole de l’éducation et la censure des livres, de lui prêter main-forte contre les hérétiques, les schismatiques et les libres penseurs. De toutes ces obligations acceptées par les rois, le souverain nouveau se décharge, et néanmoins il se réserve, auprès du saint-siège, les mêmes prérogatives, et, sur l’Église, les mêmes droits que ses prédécesseurs. Aussi minutieusement qu’autrefois, il régente les détails du culte. Tantôt il fixe le casuel et les honoraires dus au prêtre pour l’administration des sacrements : « Cette fixation[1] est une opération purement civile et temporelle, puisqu’elle se résout en une levée de deniers sur les citoyens ; les évêques et les prêtres ne pourraient s’en arroger la faculté ; le gouvernement seul doit demeurer arbitre entre le prêtre qui reçoit et le particulier qui paye, » Tantôt il intervient dans la publication d’une indulgence plénière : « Il importe[2] que des indulgences ne soient pas accordées pour des causes qui seraient contraires à la tranquillité publique

  1. Discours, rapports, etc., par Portalis, 101.
  2. Ib., 378.