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LE RÉGIME MODERNE


Presque aussitôt, le tambour, l’exercice et les autres pratiques trop manifestement napoléoniennes disparaissent dans les établissements privés et publics d’instruction moyenne ; le régime scolaire cesse d’être un apprentissage militaire, et le collège n’est plus l’annexe préparatoire de la caserne. Un peu plus tard et pendant plusieurs années, dans des chaires de l’État, à la Sorbonne, M. Guizot, M. Cousin, M. Villemain professent, en toute liberté, avec éclat, devant une foule attentive et passionnée, sur les plus hautes questions de philosophie, de littérature et d’histoire. Ensuite, sous la monarchie de Juillet, l’Institut, mutilé par le Premier Consul, se répare, se complète, et retrouve dans l’Académie des sciences morales et politiques la classe suspecte qui, depuis le Consulat, lui manquait. En 1833, un ministre, M. Guizot, pourvoit, par une loi qui est une institution, à l’entretien régulier, à la dotation obligatoire, au recrutement certain, à la qualité, à l’universalité de l’enseignement primaire, et pendant dix-huit ans, aux trois étages de l’enseignement, l’engin universitaire, modérant sa pression ou émoussant ses pointes, travaille sous des mains tolérantes ou libérales, avec tous les ménagements que comporte sa structure, de façon à faire beaucoup de bien sans faire beaucoup de mal, à contenter à demi la majorité qui est tout ensemble demi-croyante et demi-libre penseuse ; à ne choquer gravement personne, sauf le clergé catholique et cette minorité intransigeante qui, par principe doctrinal ou par zèle religieux, assignent à l’éducation, comme