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LE RÉGIME MODERNE


cien régime, pour que de cette école il sortît un penseur érudit et indépendant, un Montesquieu.

III

Partout ailleurs, la direction et la portée de l’enseignement supérieur sont pareilles. Dans les facultés des sciences et des lettres, encore plus que dans les facultés de médecine et de droit, le principal emploi des professeurs est la collation des grades. Eux aussi, ils confèrent les titres de bachelier, de licencié, de docteur ; mais ils ne préparent pas le futur bachelier ; c’est le lycée qui le fournit à l’examen, tout prêt, frais émoulu ; ils n’ont donc pour auditeurs que les futurs licenciés, c’est-à-dire quelques maîtres d’étude, de loin en loin un licencié qui a besoin d’être docteur, afin de monter dans la hiérarchie universitaire. Outre cela, de rares amateurs, presque tous d’âge mûr, qui viennent rafraîchir leurs souvenirs classiques, et des désœuvrés qui veulent occuper une heure, servent à remplir la salle ; afin que les banquettes ne restent pas vides, le cours devient une conférence d’athénée, assez agréable ou assez sommaire pour intéresser ou du moins pour ne pas rebuter les gens du monde[1]. — Restent, pour enseigner véritablement la science aux travailleurs qui veulent décidément acquérir la science, deux établissements qui, dans le naufrage universel de l’ancien régime, ont seuls sur-

  1. Bréal, Quelques mots sur l’Instruction publique (1872), 327, 41. — Liard, Universités et Facultés, 13 et suivantes.