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LE RÉGIME MODERNE


milliers de créatures vivantes, indéfiniment viables. En sorte que, parmi les effets de la Révolution française, l’un des principaux et des plus durables est la restauration des instituts monastiques.

De toutes parts, et sans interruption, depuis le Consulat jusqu’aujourd’hui, on les voit surgir et se multiplier. Tantôt, sur les vieux troncs que la hache révolutionnaire avait tranchés, des bourgeons nouveaux repoussent et pullulent. En 1800, « rétablir[1] une corporation choquait toutes les idées du temps ». Mais les bons administrateurs du Consulat avaient besoin, pour leurs hôpitaux, de servantes volontaires : à Paris, le ministre Chaptal découvre une supérieure qu’il a jadis connue, la charge de réunir dix ou douze de ses compagnes survivantes, les installe rue du Vieux-Colombier, dans une maison qui appartient aux hôpitaux, et qu’il aménage pour 40 novices ; à Lyon, il remarque que les sœurs de l’hôpital général ont dû, pour continuer leur service, s’habiller en laïques ; il les autorise à reprendre leur costume et leurs croix ; il leur donne 2000 francs pour acheter le nécessaire, et, quand elles ont revêtu leur ancien uniforme, il les présente au Premier Consul. Voilà, sur l’institut de Saint-Vincent de Paul à Paris, et sur l’institut de Saint-Charles à Lyon, le premier bourgeon renaissant, bien petit et bien faible. De nos jours[2], la

  1. Mes souvenirs sur Napoléon, par le comte Chaptal, 71.
  2. État des congrégations, communautés et associations religieuses, autorisées et non autorisées, dressé en exécution de l’article 12 de la loi du 28 décembre 1876. (Imprimerie nationale, 1878.) — L’Institut des Frères des Écoles chrétiennes, par Eugène