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L’ÉGLISE


de division ; à Paris, dans telle paroisse, à côté du préfet de police ou du préfet de la Seine[1]. Même dans la plus humble cure, il émarge chaque mois au budget, il dispose de tout son argent sans consulter personne ; hors de ses heures de service, toutes ses heures sont à lui : il peut dîner chez autrui, commander au logis tel plat pour sa table, s’accorder des douceurs ; s’il n’a pas toutes ses aises, il en a quelques-unes, et aussi, comme un fonctionnaire laïque, l’envie de faire son chemin, le désir d’être promu à une meilleure cure, de devenir inamovible, d’être nommé chanoine, quelquefois l’ambition de monter plus haut, très haut, aux premiers grades. Par toutes ces pensées mondaines, le monde le tient ; il y est trop engagé pour s’en détacher tout à fait ; le plus souvent, parmi tant de préoccupations terrestres, sa vie spirituelle languit ou avorte. — Si le chrétien veut se procurer l’alibi et habiter dans l’au-delà, il lui faut un autre régime, un abri contre deux tentations, c’est-à-dire l’abdication de deux libertés dangereuses, l’une qui est le pouvoir par lequel, étant propriétaire, il dispose à son gré des choses qui lui appartiennent, l’autre qui est le pouvoir par lequel, étant maître de ses actes, il dispose à son gré de ses occupations quotidiennes. À cet effet, au vœu de continence que prononce aussi le prêtre séculier, le religieux ajoute deux autres vœux distincts et précis. Par le vœu de pauvreté, il

  1. On estime à 40 000 francs par an le casuel du curé de la Madeleine. Le préfet de police a 40 000 francs par an et le préfet de la Seine, 50 000 francs.