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L’ÉGLISE


jours, l’évêque, en fait et en droit, est un général de division, et, en droit comme en fait, ses curés ne sont plus que des sergents ou caporaux. D’un grade si haut sur des grades si bas, le commandement tombe droit avec une force extraordinaire, et du premier coup entraîne l’obéissance passive. La discipline, dans un diocèse, est aussi parfaite que dans un corps d’armée, et, publiquement, les prélats s’en font gloire. « C’est une insulte, disait au sénat le cardinal de Bonnechose[1], de supposer que nous ne sommes pas maîtres chez nous, que nous ne pouvons pas diriger notre clergé, que c’est lui qui nous dirige… Il n’y a pas un général dans cette enceinte qui acceptât le reproche de ne pas se faire obéir par ses soldats. Chacun de nous a aussi son régiment à commander, et ce régiment marche. »

III

Pour faire marcher une troupe, un bâton, même pastoral, ne suffit pas ; avec la subordination forcée, il faut

    bon service des paroisses, à l’honneur même des prêtres et de l’Église, eu égard à la difficulté des temps où nous vivons. L’inamovibilité a été instituée pour des temps et des pays heureux où les peuples remplissaient tous leurs devoirs et où le ministère sacerdotal pouvait n’être qu’un simple ministère de conservation ; aujourd’hui, c’est un ministère de conquête et d’apostolat. Donc il faut que l’évêque puisse disposer de ses prêtres selon leur aptitude à cette œuvre, selon leur zèle et leurs succès possibles, comme dans un pays à convertir. » — Contre l’officialité et la publicité de ses jugements : « Il ne faut pas qu’elle fasse, d’un malheur réparable, un scandale que rien ne pourra réparer. »

  1. Moniteur, séance du 11 mars 1865.


  le régime moderne, III.
T. XI. — 7