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L’ÉGLISE


lui semble, dans son cabinet, portes closes, en secret, d’après des renseignements dont il contrôle seul la valeur, et avec des motifs dont il évalue seul le poids. Tantôt le magistrat qui siège est un de ses grands-vicaires, son délégué révocable, son homme de confiance, son porte-voix, bref un autre lui-même, et cet official opère sans s’astreindre aux anciennes règles, aux obligations d’une procédure fixe et définie par avance, à l’échelonnement des formes judiciaires, aux confrontations et vérifications, aux délais, à toutes les précautions légales qui mettent le juge en garde contre la prévention, la précipitation, l’erreur, l’ignorance, et sans lesquelles la justice court toujours risque d’être injuste. Dans les deux cas, la tête sur laquelle la sentence est suspendue manque de garanties, et, une fois prononcée, cette sentence est définitive. Car, en appel, devant l’official métropolitain, elle est toujours confirmée[1] ; les prélats se soutiennent entre eux, et, pour l’appelant, qu’il ait tort ou raison, l’appel est par lui-même une mauvaise note : il ne s’est pas soumis à l’instant, il a regimbé contre la correction, il a manqué d’humilité, il a donné un exemple d’indiscipline, et cela seul est une faute

  1. Émile Ollivier, l’Église et l’État au concile du Vatican, II, 517. — L’abbé André, ib., 17, 19, 30, 280 (Divers exemples, notamment appel d’un curé rural, 8 février 1866) : « Le métropolitain lui fit observer d’abord qu’il ne pouvait se résoudre à condamner son suffragant. » Ensuite (20 février 1866), jugement confirmatif par l’officialité métropolitaine, portant « qu’il n’y a nullement lieu de déclarer exagérée et réformable la peine de privation du titre de recteur de la paroisse de X…, titre purement manuel et révocable au simple gré de l’évêque ».