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L’ÉGLISE


ministère public, procureurs, avocats et greffiers, astreints à l’observation de toutes les formes judiciaires, écritures authentiques, citations des témoins et récusations des témoignages, interrogatoires et plaidoyers, allégations des canons, lois et précédents, présence du défendeur, débats contradictoires, procédures dilatoires, publicité et scandale. Devant les lenteurs et les inconvénients d’un tel procès, souvent l’évêque évitait de frapper, d’autant plus que ses coups, même confirmés par le tribunal ecclésiastique, avaient chance d’être parés ou amortis par le tribunal laïque ; car, du premier au second, il y avait appel comme d’abus, et le second, rival jaloux du premier, était mal disposé pour les autorités sacerdotales[1] ; d’ailleurs, dans la seconde instance, encore plus que dans la première, l’évêque trouvait en face de lui, non seulement le droit plus ou moins légal de sa partie, mais encore les alliés et patrons de sa partie, corps et individus qui, selon un usage admis, intervenaient par leurs sollicitations auprès des juges et, publiquement, mettaient tout leur crédit au service de leur protégé. Avec tant de bâtons dans les roues, une machine administrative ne marche que difficilement ; pour imprimer à celle-ci le mouvement efficace, il eût fallu la pression assidue, l’initiative incessante, l’effort attentif et persévérant d’une main laborieuse, énergique, endurcie aux froissements, et, sous l’ancien régime, les belles mains blanches d’un prélat gentilhomme n’étaient guère propres à ce rude métier ; elles

  1. L’abbé Élie Méric, ib., 392 à 403 (Détails à l’appui).