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LE RÉGIME MODERNE


le pouvoir civil. Après Napoléon, et au sortir de ses terribles mains, les catholiques ont de bonnes raisons pour répugner à sa théologie ; elle a conduit en prison trop de catholiques, les plus éminents en dignité, en sainteté, évêques et cardinaux, y compris le pape ; les maximes gallicanes sont déshonorées par l’usage que Napoléon en a fait. Insensiblement, dans l’enseignement et dans les séminaires, le droit canon aboutit à des conclusions inattendues ; les textes et arguments contraires à l’autorité du pape semblent de plus en plus faibles[1] ; les textes et arguments favorables à l’autorité du pape paraissent de plus en plus forts ; les docteurs auxquels on défère ne sont plus Gerson et Bossuet, mais Bellarmin et Suarez ; on découvre des nullités dans les décrets du concile de Constance ; il se trouve que la Déclaration faite en 1682 par le clergé de France contient des erreurs condamnables et condamnées[2]. Dès 1819, un puissant logicien, incomparable héraut et champion superbe, M. de Maistre, dans son livre du Pape, justifie, prépare et annonce la prochaine constitution de l’Église. — Pied à pied, l’assentiment de la communauté catholique est acquis ou conquis[3] ; aux

  1. On trouvera les deux systèmes exposés avec une impartialité et une précision rares dans l’Église et l’État au concile du Vatican, par Émile Ollivier, I, chap, II et III.
  2. Bercastel et Henrion, XIII, 14 (Lettre de Mgr d’Aviau, archevêque de Bordeaux, 28 octobre 1815). Cette fameuse déclaration de 1682, depuis plus « de cent trente ans, douze papes consécutifs ne cessent de l’improuver ».
  3. Émile Ollivier, l’Église, etc., I, 315-319 (Déclarations des conciles provinciaux de France et des conciles nationaux et pro-