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LE RÉGIME MODERNE


pas su ou on n’avait voulu tenir compte de ces sentiments si naturels et si forts ; par négligence ou par optimisme, on avait introduit le contribuable dans le mécanisme en qualité de premier agent, avant 1789 en qualité d’agent responsable et contraint, après 1789 en qualité d’agent volontaire et bénévole. C’est pourquoi, avant 1789, la machine était malfaisante, et, depuis 1789, impuissante ; avant 1789, son jeu était presque meurtrier[1] ; depuis 1789, son rendement était presque nul[2]. — Enfin, voici des opérateurs indépendants, spéciaux et compétents, éclairés par des informateurs locaux, mais soustraits aux influences locales, tous nommés, payés, appuyés par le gouvernement central, astreints à l’impartialité par le recours du contribuable au conseil de préfecture, astreints à la régularité par la vérification finale d’une cour des comptes, intéressés par leur cautionnement et par des bénéfices au recouvrement intégral des contributions échues et au versement prompt des contributions perçues, tous, percepteurs, contrôleurs, directeurs, inspecteurs et receveurs généraux, bons comptables, surveillés par de bons comptables, maintenus dans le devoir par la crainte, avertis que les malversations, lucratives sous le Directoire[3],

  1. L’Ancien Régime, tome II, 233 à 246.
  2. La Révolution, tome IV, 140 à 146. — Stourm, les Finances de l’ancien régime, I, 168 à 171 (Discours de Bénard-La-Grave aux Cinq-Cents, 11 pluviôse an IV) : « On ne peut se dissimuler que, depuis quelques années, on a voulu s’habituer à ne plus payer d’impôts. »
  3. Stourm, les Finances de l’ancien régime, II, 365 (Discours d’Ozanam aux Cinq-Cents, 14 pluviôse an VII) : « Trafic scanda-