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LE RÉGIME MODERNE


VII

Comment repousser une plainte si juste, la plainte universelle des indigents, des parents, des fidèles ? — Ici reparaît la difficulté capitale, l’embarras presque inextricable que la Révolution lègue à tout gouvernement régulier, je veux dire, l’effet persistant des confiscations révolutionnaires et le conflit qui met aux prises deux droits sur le même domaine, le droit du propriétaire dépouillé et le droit du propriétaire investi. Cette fois encore, la faute est à l’État, qui de gendarme s’est fait brigand, et s’est approprié par violence la fortune des hôpitaux, des écoles, des églises ; à lui de la rendre, en argent ou en nature. En nature, il ne le peut plus : elle a coulé hors de ses mains, il en a aliéné ce qu’il a pu, il n’en détient plus que des restes. En argent, il ne

    l’an X. la population est de 33 111 962 individus ; l’annexion de l’île d’Elbe et du Piémont en ajoute 1 864 350. Total : 34 976 313. — Pelet de la Lozère, 203 (Paroles de Napoléon au Conseil d’État, 4 février 1804, sur les séminaires protestants de Genève et Strasbourg, et sur le nombre des protestants dans ses États) : « Leur population n’est que de 3 millions. » — Mais ce chiffre est beaucoup trop fort. D’après les recherches de M. Armand Lods aux Archives nationales et aux archives de l’Oratoire, il y avait alors trois groupes de protestants : 1o les calvinistes de l’ancienne France, 615 000 ; 2o les protestants, en grande majorité luthériens, de l’Alsace et de la Franche-Comté, environ 200 000 ; 3o les protestants des pays annexés par la République et le Consulat, environ 615 000. Total 1 430 000. (Pétition adressée à l’administration des cultes par les notables protestants, 1803.) Ces chiffres eux-mêmes sont probablement encore enflés. Portalis (dans son rapport de brumaire an XII) n’évalue les calvinistes du premier groupe qui à 500 000 au maximum.