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LE RÉGIME MODERNE


quote-part baisse au delà de toute proportion et se réduit au minimum. Cependant leur quote-part dans la jouissance locale demeure entière et pleine ; à ce prix intime, ils jouissent de toute la voie publique et bénéficient de toutes les précautions contre les fléaux physiques. Chacun d’eux en profite pour sa personne, autant que le millionnaire pour la sienne ; ainsi chacun d’eux, pour sa personne, touche autant que le millionnaire dans le dividende de sûreté, de salubrité et de commodité, dans le fruit des énormes travaux d’utilité et d’agrément qui assurent les communications, préservent la santé, facilitent la circulation, embellissent la résidence, et sans lesquels, à la ville comme à la campagne, la vie serait impossible ou intolérable. — Mais ces travaux si dispendieux, ces appareils et opérations de défense contre l’inondation, l’incendie, les épidémies et les contagions, ces 500 000 kilomètres de routes vicinales et départementales, ces digues, quais, ponts, promenades et jardins publics, ce pavage, drainage, balayage, éclairage, cette conduite et fourniture d’eau potable, tout cela est payé par quelqu’un, et, puisque ce n’est point par le petit contribuable, c’est par le contribuable gros ou moyen. Celui-ci porte donc, outre sa charge obligatoire, une surcharge gratuite, à savoir tout le poids dont l’autre est allégé.

Manifestement, plus il y aura d’allégés, plus cette surcharge sera lourde, et les allégés sont par millions. Deux millions et demi d’indigents avérés[1] sont déchar-

  1. A. de Foville, 57.