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L’ANCIEN RÉGIME


sièges importants sont dotés magnifiquement. Sens rapporte 70 000 livres, Verdun 74 000, Tours 82 000, Beauvais, Toulouse et Bayeux 90 000, Rouen 100 000, Auch, Metz, Albi 120 000, Narbonne 160 000, Paris et Cambray 200 000 en chiffres officiels, et probablement moitié en sus en sommes perçues. D’autres sièges, moins lucratifs, sont en proportion mieux traités encore. Figurez-vous une petite ville de province, qui souvent n’est pas même une mince sous-préfecture de notre temps, Conserans, Mirepoix, Lavaur, Rieux, Lombez, Saint-Papoul, Comminges, Luçon, Sarlat, Mende, Fréjus, Lescar, Belley, Saint-Malo, Tréguier, Embrun, Saint-Claude, alentour moins de deux cents, moins de cent, parfois moins de cinquante paroisses, et, pour exercer cette petite surveillance ecclésiastique, un prélat qui touche de 25 000 à 70 000 livres en chiffres officiels, de 37 000 à 105 000 livres en chiffres réels, de 74 000 à 210 000 livres en argent d’aujourd’hui. Quant aux abbayes, j’en compte trente-trois qui rapportent de 25 000 à 120 000 livres à l’abbé, vingt-sept qui rapportent de 20 000 à 100 000 livres à l’abbesse ; pesez ces chiffres de l’Almanach, et songez qu’il faut les doubler et au delà pour avoir le revenu réel, les quadrupler et au delà pour avoir le revenu actuel. Il est clair qu’avec de tels revenus et les droits féodaux de police, de justice, d’administration qui les accompagnent, un grand seigneur ecclésiastique ou laïque est, de fait, une sorte de prince dans son district, qu’il ressemble trop à l’ancien souverain pour avoir le droit de vivre en particulier