comme dans la plus simple. Cherchons donc s’il n’est pas le fil dont toute notre trame mentale est tissée, et si le déroulement spontané qui le noue maille à maille n’aboutit pas à fabriquer le réseau entier de nos pensées et de nos passions. — Sur cette idée, un esprit d’une précision et d’une lucidité incomparables, Condillac, donne à presque toutes les grandes questions les réponses que le préjugé théologique renaissant et l’importation de la métaphysique allemande devaient discréditer chez nous au commencement du dix-neuvième siècle, mais que l’observation renouvelée, la pathologie mentale instituée et les vivisections multipliées viennent aujourd’hui ranimer, justifier et compléter[1]. Déjà Locke avait dit que toutes nos idées ont pour source première l’expérience externe ou interne. Condillac montre en outre que toute perception, souvenir, idée, imagination, jugement, raisonnement, connaissance, a pour éléments actuels des sensations proprement dites ou des sensations renaissantes ; nos plus hautes idées n’ont pas d’autres matériaux ; car elles se réduisent à des signes qui sont eux-mêmes des sensations d’un certain genre. Ainsi les sensations sont la substance de l’intelligence humaine comme de l’intelligence animale ; mais la première dépasse infiniment la seconde, en ceci que, par
- ↑ Pinel (1791), Esquirol (1838), sur les maladies mentales, — Prochaska, Le Gallois (1812), puis Flourens pour les vivisections, — Hartley et James Mill, à la fin du dix-huitième siècle, suivent en psychologie la même voie que Condillac ; aujourd’hui toute la psychologie contemporaine y est rentrée. (Wundt, Helmholtz, Fechner en Allemagne, Bain, Stuart Mill, Herbert Spencer, Carpenter en Angleterre.)