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L’ANCIEN RÉGIME


deux cent quinze palefreniers d’attribution et à peu près autant de chevaux entretenus aux frais du roi pour diverses autres personnes toutes étrangères au département[1]. Sur cette seule branche de l’arbre royal, quelle nichée de parasites ! — Ailleurs je vois que Madame Élisabeth, si sobre, consomme par an pour 30 000 francs de poisson, pour 70 000 francs de viande et gibier, pour 60 000 francs de bougies ; que Mesdames brûlent pour 215 068 francs de bougie blanche et jaune ; que le luminaire chez la reine revient à 157 109 francs. On montre encore à Versailles la rue, jadis tapissée d’échoppes, où les valets du roi venaient, moyennant argent, nourrir Versailles de sa desserte. — Il n’y a point d’article sur lequel les insectes domestiques ne trouvent moyen de gratter et grappiller. Le roi est censé boire chaque année pour 2190 francs d’orgeat et de limonade ; « le grand bouillon du jour et de nuit », que boit quelquefois Madame Royale âgée de deux ans, coûte par an 5201 livres. Vers la fin du règne précédent[2], les femmes de chambre comptent en dépense à la Dauphine « quatre paires de souliers par semaine, trois aunes de ruban par jour pour nouer son peignoir, deux aunes de taffetas par jour pour couvrir la corbeille où l’on dépose les gants et l’éventail ». — Quelques années plus tôt, en café, limonade, chocolat, orgeat, eaux glacées, le roi payait par an 200 000 francs ; plusieurs personnes étaient

  1. Archives nationales. Rapport de M. Teissier (1780). Rapport de M. Mesnard de Chouzy (O1, 738).
  2. Marie-Antoinette, par Arneth et Geffroy, I, 277 (29 fév. 1772).