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L’ANCIEN RÉGIME


vais comprendre qu’en politique on pût se décider d’après ses préférences. Mes gens affirmatifs construisaient une constitution comme une maison, d’après le plan le plus beau, le plus neuf ou le plus simple, et il y en avait plusieurs à l’étude, hôtel de marquis, maison de bourgeois, logement d’ouvriers, caserne de militaires, phalanstère de communistes, et même campement de sauvages. Chacun disait de son modèle : « Voilà la vraie demeure de l’homme, la seule qu’un homme de sens puisse habiter ». À mon sens l’argument était faible : des goûts personnels ne me semblaient pas des autorités. Il me paraissait qu’une maison ne doit pas être construite pour l’architecte, ni pour elle-même, mais pour le propriétaire qui va s’y loger. — Demander l’avis du propriétaire, soumettre au peuple français les plans de sa future habitation, c’était trop visiblement parade ou duperie : en pareil cas, la question fait toujours la réponse, et d’ailleurs, cette réponse eût-elle été libre, la France n’était guère plus en état que moi de la donner : dix millions d’ignorances ne font pas un savoir. Un peuple consulté peut à la rigueur dire la forme de gouver-