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LA STRUCTURE DE LA SOCIÉTÉ


qui en feraient une autre ; nous dont le sort fait crier jusqu’aux pierres et aux chevrons de nos misérables presbytères », nous subissons des prélats « qui feraient encore quelquefois faire par leurs gardes un procès au pauvre curé qui couperait dans leurs bois un bâton, son seul soutien dans ses longues courses par tous chemins ». À leur passage, le pauvre homme « est obligé de se jeter à tâtons le long d’un talus, pour se garantir des pieds et des éclaboussures de leurs chevaux, comme aussi des roues et peut-être du fouet d’un cocher insolent », puis « tout crotté, son chétif bâton d’une main et son chapeau, tel quel, de l’autre, de saluer humblement et rapidement, à travers la portière du char clos et doré, le hiérarque postiche ronflant sur la laine du troupeau que le pauvre curé va paissant et dont il ne lui laisse que la crotte et le suint ». Toute la lettre est comme un long cri de rage ; ce sont des rancunes semblables qui feront les Joseph Lebon et les Fouché. — Dans cette situation et avec ces sentiments, il est manifeste que le bas clergé traitera ses chefs comme la noblesse de province a traité les siens[1]. Il ne choisira pas « pour représentants ceux qui nagent dans l’opulence et qui l’ont vu toujours souffrir avec tranquillité ». De toutes parts les curés

  1. Hippeau, ib., VI, 164. (Lettre du curé de Marolles et de treize autres. Lettre de l’évêque d’Évreux du 20 mars 1789. Lettre de l’abbé d’Osmond du 2 avril 1789.) — Archives nationales, Procès-verbaux manuscrits des États généraux, t. 148, 245 et 257, Mémoires des curés de Toulouse ; t. 150, 282, représentations par le chapitre de Dijon.