Page:Taine - Le Positivisme anglais, 1864.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la nature ne peuvent être moins nombreuses que les espèces distinctes de nos sensations. Nous pouvons bien réduire un mouvement à un autre mouvement, mais non la sensation de chaleur à la sensation d’odeur, ou de couleur, ou de son, ni l’une ou l’autre à un mouvement. Nous pouvons bien ramener l’un à l’autre des phénomènes de degré différent, mais non des phénomènes d’espèce différente. Nous trouvons les sensations distinctes au fond de toutes nos connaissances, comme des éléments simples, indécomposables, absolument séparés les uns des autres, absolument incapables d’être ramenés les uns aux autres. L’expérience a beau faire, elle ne peut supprimer ces diversités qui la fondent. D’autre part, l’expérience a beau faire, elle ne peut se soustraire aux conditions dans lesquelles elle agit. Quel que soit son domaine, il est limité dans le temps et dans l’espace ; le fait qu’elle observe est borné et amené par une infinité d’autres qu’elle ne peut atteindre. Elle est obligée de supposer ou de reconnaître quelque état primordial